Le 29 avril, la banque d’Algérie a décidé de baisser de ¼ de point son taux directeur le ramenant de 3,25 à 3%. Elle a aussi abaissé son taux de réserves obligatoire de 8 à 6%. Enfin, elle a relevé le seuil de refinancement des titres publics négociables[1]. Ces mesures viennent prolonger celles déjà prises pour limiter l’impact de la crise sanitaire. La banque d’Algérie avait en effet rapidement révisé ses conditions afin d’améliorer la liquidité des banques, en baissant son taux directeur et le taux de réserves obligatoires, respectivement de 3,5% à 3, 25% et de 10% à 8%, à partir du 15 mars 2020. Le 6 avril, elle avait aussi émis une instruction allégeant, exceptionnellement, certaines dispositions prudentielles en matière de liquidité, de fonds propres et de classement des créances[2].
Dans son communiqué en date du 29 avril, la banque d’Algérie avait exhorté les banques à adhérer à sa démarche, et à « prendre toutes les initiatives et déployer toutes les mesures à l’effet de mettre à la disposition des petites et moyennes entreprises, des start-ups et des investisseurs en général, une offre de crédit à un coût raisonnable, permettant ainsi à l’économie nationale d’évoluer vers des perspectives nouvelles (…) ».
Il est assez difficile de dire si ces mesures sont effectives en pratique, peu d’informations transparaissant de la part des banques ou des entreprises. Par ailleurs, il faut signaler qu’une proportion importante des entreprises privées n’accèdent pas au crédit pour différentes raisons. Enfin parmi les entreprises privées qui accédaient au crédit, un nombre réduit d’entre elles avaient bénéficié de montants assez importants, sans commune mesure avec leur capacité à honorer le service de leur dette, ou même sans rapport avec leur actif net. Pour le reste des entreprises privées accédant au crédit, la crise actuelle et l’incertitude sur la reprise amène naturellement les banques à être prudentes. Afin de dépasser leurs réticences l’Etat aurait pu garantir exceptionnellement un montant d’emprunt équivalent à une proportion du chiffre d’affaire de ces entreprises, qu’elles aient ou non accédé auparavant au crédit.
Paradoxalement c’est précisément à des risques avérés que l’Etat doit donner sa garantie de manière implicite ou explicite à travers la demande de crédit des entreprises publiques. S.N.T.F, Air Algérie, Sider, ont rendu publiques leurs difficultés de trésorerie, mais on peut se douter que les difficultés touchent une proportion beaucoup plus importantes des entreprises publiques. Et à moins d’une réforme audacieuse, l’habitude est que l’Etat enjoigne aux banques de les financer et ensuite épongera les dettes de ces entreprises avec une neme restructuration. Les créances non performantes sur le secteur privé, et les créances « à restructurer » sur les entreprises publiques montrent tout le non-sens d’un système bancaire algérien se détournant des besoins de financement des entreprises viables pour au contraire soutenir massivement, par injonction, des entreprises publiques ou privée, dont la plus faible orthodoxie bancaire l’aurait détourné.
Notes:
- ^ Echéances résiduelles inférieures à 1 an : de 90% à 95%, échéances résiduelles de 1 an à inférieures à 5 ans : de 80% à 90%, échéances résiduelles égales ou supérieures à 5 ans : de 70% à 85%.
- ^ Ces mesures étaient :Le seuil minimum du coefficient de liquidités est ramené à 60%[2]. Ce seuil était fixé depuis 2011 à 100%. C’est donc une contrainte très forte en matière de liquidité qui s’est vu relâchée.suppression de l’obligation de constitution du coussin de sécurité[2].Autorisation de reporter le paiement des tranches de crédits, arrivant à échéance, ou de procéder au rééchelonnement des créances de la clientèle ayant été impactée par la crise du Covid 19. Ces créances sont soustraites aux dispositions de l’article 07 du règlement n°2014-03 du 16 février 2014 relatif au classement et provisionnement des créances et des engagements En clair les créances relevant de ce dispositif vont être considérées comme des créances courantes et vont nécessiter un provisionnement minimal, ne dépassant pas 3%, tandis que leur classement « normal » (créances à problèmes potentiels, créances très risquées, ou créances compromises) aurait nécessité un provisionnement au taux minimum de 20 %, 50 % ou 100 % respectivement.Enfin, les banques et établissements financiers peuvent consentir de nouveaux crédits à la clientèle ayant bénéficié des mesures de report ou de rééchelonnement au titre de ce dispositif exceptionnel.