La banque d’Algérie a publié, par le biais de l’APS, de premiers éléments sur la balance des paiements au premier trimestre. Il y apparait un déficit de 2,536 milliards de dollars. Beaucoup moindre que ce qu’on pouvait redouter. A la même période en 2019, il était de 5,86 milliards. Que s’est-il passé donc alors que les risques qu’il ne s’accentue étaient bien présents avec la baisse des prix pétroliers ? Ces derniers sont passés d’une moyenne de près de 64 $ à 53,3 ?
1et 2019 | 1er T 2020 | |
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Biens (FOB) | -3,166 | -3,203 |
Services facteurs et non facteurs | -3,017 | -1,409 |
Transferts | 0,7 | 0,453 |
Balance courante | -5,483 | -4,159 |
Capital | 0,333 | 1,623 |
Déficit | -5,816 | -2,536 |
Baisse des réserves | 7,311 | 3,83 |
Prix pétroliers ($/B) | 63,97 | 53,3 |
Unité : milliards de dollars
Source : Reconstitutions d’après données BA publiées par APS
Le déficit de la balance commerciale s’est légèrement accentué. Ceci n’est pas contradictoire avec ce qui apparaissait dans les données de la douane pour le premier trimestre (voir notre article 1er Trimestre 2020 : forte baisse des importations de biens d’équipement et de demi-produits).
Il faut savoir en effet que les chiffres publiés par la douane enregistrent les flux physiques de marchandises, alors que la balance des paiements, comme son nom l’indique, enregistre les flux de paiements. Il peut y avoir une différence importante dans la date d’enregistrement de l’importation ou de l’exportation physique d’une marchandise et celle de son paiement. Par ailleurs la balance des paiements enregistre les importations à leur valeur au port d’embarquement, valeur appelée FOB. La douane enregistre les importations CIF (c’est-à-dire assurance et transport compris). Dans la balance des paiements, le transport et l’assurance apparaissent dans les services non facteurs.
Par rapport à 2019, il y a des différences importantes dans deux soldes. Le premier est celui des services facteurs et non facteurs. En réalité les deux types de services sont présentés de manière distincte, mais il s’agit, ici, d’une reconstitution d’après les bribes fournies par l’APS. On ne pouvait pas faire autrement. Les services non facteurs sont les services de transport, d’assurance, d’engineering, de télécom etc… Enfin, tous les services échangeables. Les services facteurs sont les recettes ou les dépenses de rémunération des facteurs, notamment les paiements de salaire et les revenus de l’investissements (rapatriement de profit) ainsi que les paiements d’intérêt et autres…
Une chute aussi importante du solde des services facteurs et non facteurs s’expliquerait à priori par une baisse des services non facteurs (assurances et fret liés à la baisse des importations, engineering etc…), ainsi que (hypothèse) une baisse des rapatriements de profits des sociétés étrangères, à commencer par les pétrolières.
Dans un deuxième poste, on enregistre une hausse importante d’un solde positif. Il s’agit du compte de capital, dont le solde positif a augmenté de 1,3 milliards de DA. Il peut s’expliquer par un flux entrant d’investissement direct et/ou d’ endettement extérieur.
Ces éléments positifs expliquent que le déficit de la balance des paiements ait baissé de plus de moitié passant de -5,8 à -2,5 milliards de DA. Cela explique que la BA ait très peu ponctionné dans les réserves de change. En tous cas beaucoup moins que l’année passée : 3,8 milliards contre 7,3 l’année passée au même trimestre. La différence entre le déficit de la balance des paiement et les réserves de change s’explique par les mouvements de taux de change des monnaies dans lesquelles sont détenues les réserves de change, principalement le dollars et l’Euro.
A fin 2019, les réserves de change étaient évaluées à 62 milliards de dollars. A fin mars elles devaient donc se monter à 59,5 milliards de dollars.
Il est difficile de se prononcer sur le reste de l’année 2020, car si les paiements vont sans doute être moindres (importations de biens et de services, baisse des services facteurs), les prix pétroliers ont aussi baissé très fortement à partir de deuxième trimestre ainsi que les quantités. On peut tabler, de manière très imprécise, sur une déficit compris entre 15 et 20 milliards de dollars, ce qui amènerait les réserves de change autour de 45 milliards de dollars.